mercredi 19 septembre 2007

Le long des peupliers... retour en Turquie

Apres avoir accepte de jouer a counter strike, curieux de l'effet que ca aura sur mois apres deux mois de bourlingue, et etre virtuellement mort plusieurs fois dans ce cyber cafe de Tabriz (j'etais dans le camp des terroristes), je suis vite lasse. La soeur d'Emran se pame au telephone avec moi, meme si je ne sais pas trop quoi lui dire...



Emran commence a me deplaire quand il se met fierement a me dire toute son admiration pour Hitler, sa haine des juifs. Il deteste aussi l'Islam, lui dont le pere est Mollah et a plusieurs femmes, plus d'une dizaine d'enfants. Malgre le choc je temte de prendre un peu de distance, mettant ces propos inacceptables sur le compte de sa jeunesse et de son ignorance. Je me demande ce que leur racontent leurs livres d'histoire par ici... Pour Emran, Hitler n'a fait qu'une guerre legitime contre les juifs, qui aujourd'hui n'ont pas le droit de rentrer en Iran. De meme, si j'avais eu un visa israelien dans mon passeport, je n'aurai jamais pu y entrer. Ses manieres de fils de mollah gate, irrespectueux et impatient (Ammar dirait qu'iln'est pas "educated") commencent a m'agacer pile au moment ou il me laisse en plan ; desole mais il ne peut pas m'inviter papa n'aime pas les etrangers.

Je reste un peu au netcafe, avec des jeunes amicaux mais qui a eux trois connaissent 20 mots d'anglais. Je reussis a leur faire comprendre que je veux dormir au parc Elgoli, la ou j'avais deja passe une nuit en arivant en Iran. Ils m'assurent qu'un ami va venir et m'y amener gratuit car ce n'est pas a cote. Trois heures d'attente rendues interminables par la fatigue et l'horrible envie de se soulager. Aucun chiottes a la ronde.Apres deux heures et demie de gene et d'atroces douleurs, je me lache dans les caniveaux gorges d'eau vive, oubliant toutes reserves, heureux de pouvoir respirer normalement... Arrivee a quatre heures du matin au parc.

Le matin je m'esquive vite sous le regard de familes suspicieuses, retentant la security police et l'extension du visa, mais sans succes. Ce sera la Turquie, definitivement. Au guichet de bus je rencontre Lin Zhemin, un delicieux taiwanais qui parle francais, turc et un peu farsi apres des etudes de linguiste. On prend ensemble le the (avec des petits gateaux au miel, c'est le dernier jour quoi) en attendant le bus pour Makou, car lui aussi doit rejoindre la Turquie apres 24 jours en Iran. On est vite rejoints par un farsi russophone, habitue de l'Asie centrale.

De gauche a droite : le farsi, Lin Zhemin, le fils du farsi, et bibi.


Dans le bus, longue discussion avec Lin Zhemin, que je finis par laisser dormir, histoire qu'il se remette de la grippe que lui ont file des japonais revenus du Pakistan (Il prenait ses precautions et a reussi a ne pas me la refiler).


Dernier salut de ma tronche de cake au mont Ararat. A ma droite, l'Iran, a ma gauche, la Turquie (En fait le Kurdistan, mais chut, les turcs pourraient entendre)


On mange notre dernier chachlik iranien dans le restaurant a peine rempli d'un hotel aux chambres vides d'un poste frontiere peuple de changeurs de devise a la sauvette et taxis vehements. De retour en Turquie, je fais encore un salut au pere Ararat, immortalise par Emin (le nom turque de Lin Zhemin) et on repasse par Dogubayazit. On s'en tire a deux pour un lit a l'hotel a 7 euros chacun. On reprend le the ensemble le matin, vite rejoints par deux guides du mont Ararat. J'aime l'attitude d'Emin avec les gens : tres ouvert, amical, sincere. Il a deja disparu avec un des guides pour lui arranger son site (il est programmeur) que je suis bloque avec l'autre, Sefer, dont je fais le portrait, mais qui me gonfle vite avec ses questions obsessionelles sur la vie sexuelle occidentale, forcement deluree, et ses questions du genre " Et si je fais un enfant par erreur, la femme saura quoi faire ? Et si il y a un bebe, l'etat s'en occupera ? Et si je ne travaille pas, l'etat me donnera de l'argent ?"J'ai beau lui repeter, il ne semble pas avoir trop envie de comprendre ce que c'est que d'etre responsable...

Je cours apres que Sefer m'ait laisse tranquille pour piquer son roupillon, arrivant juste a temps pour saluer Emin avant son depart en bus pour Kayseri. Dans le labo photo de Dogubayazit, je me suis retrouve portraitiste de la femme puis de l'homme qui le tiennent. En echange, ils me feront le developpement de ma pellicule, les scans, la copie sur ma carte memoire, et le droit d'utiliser photoshop pour redonner du contraste, en plus des nombreux verres de the habituels. A force de faire mon malin a le boire a l'iranienne, le sucre entre les dents, je me crame.

Je sais pas pourquoi, elle n'etait pas tres contente du dessin... A peine caricatural

Lui il etait tout fierot, et sa femme jalouse, aie aie aie...


Stop direct jusqu'a Erzurum.Cette fois le camionneur kurde a deux couchettes et aucune envie de se frotter les fesses contre moi. Il arrive du Tadjikistan, et va jusqu’a Istamboul. Woua. Me voyant tout triste de n’avoir pu aller plus a l’est il me donne des billets turkmenes, ouzbekes et tadjiks en souvenir. La nuit se passe bien, on n’est pas loin d’Erzurum mais une panne de son camion m’oblige a faire mes adieux a ce vieux kurde bourru et malicieux ; je continue en stop.A Erzurum, je me fais a nouveau payer le the par le tenancier germanophone de la cantine-resto du quartier, visite un peu le bled, sa mosquee, ses maisons en ruine... Ou je peux tranquillement me curer les pieds, gratter les calles, bistouriser les champignons.... « faudrait menager ta monture, pepere.. » Un dernier the avec les ouvriers d’Erzurum, et je repars en stop avec Ermedjusqu’a Ashkale, ou avec ses potes je prendrai, devinez quoi ?... Le the !

Ermed, la classe du dadash, (region d'Erzurum) all simply.


Apres un croquis de sa bobine rieuse, je le laisse faire la sieste pour qu’un religieux m’avance jusqu’a Trabzon, interrompant sa routepour la priere ou un the, ou il raconte a chaque fois que je lui ai demande si il etait mollah en riant grassement.


Mollah wannabe


A trabzon, un seul epithete me travaile le cerveau : poisseux. Decidement je n’aime pas trop la mer. M’assurant, sans doute avec raison, que dormir a l’otogar est plus sur que dans le coin de l’ambassade Russie, c’est la que me depose mon wannabe de mollah. Nombreux sont les dormeurs sur les pelouses et bancs de l’Otogar. Je m’installe sur la pelouse, a l’ombre des reverberes, et suis reveille quelques temps apres par trois gouttes de pluie, avec la desagreable surprise de trouver un clochard a l’haleine de chacal love contre moi. Vu comment il se demene pour se faire accepter, je decide de le tolerer pour ne pas augmenter son malheur, tout en m’ecartant significativement. Il se rapproche souvent, je montre mon irritation, jusqu’a ce qu’il ait la brillante idee de m’attraper brusquement la bite, ce crevard ! Ma pitie a des limites et je lui gueule mon mepris et les trois mots de turc que je connais appropries a la situation. Je me barre en vitesse, recuperant precipitamment mes affaires. J’accepte cinq minutes apres qu’il me rende mes sandales oubliees la-bas, mais doit expliquer a cette sangsue-la que non, vraiment, «pas ami » et que lui, la-bas ; moi, ici, tout en evitant a nouveau ses affreuse demonstrations d’affection (il me faisait des baise-mains et des inclinations de tete comme a un seigneur, ca va pas la tete ! ). MersAllah, il finit par piger et m’accorder paix et sommeil. Cette fois, les trois gouttes qui bruinent pendant la nuit neme pertuberont pas d’un pouce...

Ne dites jamais a un chauffeur de taxi turc que vous n’avez pas d’argent si vous n’etes pas prets a en assumer les consequences : ils vous paieront les deux minibus jusqu’a l’ambassade de Russie ! Vous leur sortez ca juste pour trouver un alibi a ne pas prendre le taxi, et finalement ces beaux cons-la vous croient ? Generosite doublee d’une certaine naivete, je les adore ces turcs... Tout ca me fait arriver bien tot a l’ambassade, qui a decide de n’ouvrir qu’a 11h. Ce qui me laisse le temps d’aller au plus bel hammam de Trabzon (suppute-je ) banquettes pour la sieste, dans une cour interieure en bois et marbre, salle ronde avec arcades et octogone sureleve central pour hammam, sauna...Decrassage, craquage des eaux. Mais les rouleaux de crasse nettoyes la-bas reapparaitront bien vite dans Trebizonde la poisseuse...


Dans Trabzon, ses rues escapees et animees, son atmosphere marine, je repense un peu a Valparaiso, avec ses collines qui encerclent la baie portuaire. Ajoutez a cela des vestiges byzantins, des putes russes s’embrouillant avec des gamins de rue qui vendent du tabac, sous les regards indifferents des prolos qui revassent a cote de leurs collegues lances dans une partie de tric-trac. Le long de la mer noire, quand les deux vieux assis sur un banc face a l’horizon m’invitent a m’assoir avec eux, je ne peux m’empecher de m’interroger sur leur « orientation sexuelle » pour parler leche comme il se doit de nos jours. Y a qu’en Turquie ou j’ai appris a me mefier des braves hommes... Mais bon, ca va, discussion habituelle, le moustachu va m’acheter une bouteille d’eau et apres avoir epuise nos banalites on se quitte cordialement.


A Aya Sofia la byzantine, les cartes postales de Sumela de l’echoppe de souvenirs me titillent, et je decide que c’est par ici que je commencerai ma viree dans le coin avant de revenir dans deux jours pour mon visa. Le stop marche jusqu’a l’oree de la ville. Mais avec le soir tombant je dois marcher un moment pour trouver un endroit relativement calme ou dormir. Au bord d’une petite route, sur le cote d’une maison abandonnee. Apres une bonne soupe dans la ville d’avant, je finis par atteindre ce monastere que seuls des moines pouvaient perches dans un tel endroit... Je veux retourner a Baybourt, que je n’ai vu qu’en passant en roulant vers Trabzon, et ou Bouvier passa, il y a plus de 50 ans. J’arrive en fin d’apres-midi, longe la riviere et les chantiers d’innombrables immeubles en construction – je me demande ce qu’il reste du temps de Bouvier.

Sumela

Hitch-hiking to...

...Bayburt !

On rentre dans une tchaikhane prendre un the en pensant ne rester qu’un moment et on finit par faire les portraits d’une dizaine d’ouvriers en batiments qui passent par la. Je suis meme engage pour faire deux portraits officiels de chefs de chantiers (avec le gamin envoye d’une bonne taloche chercher du bon papier, les poses solennelles, et l’attroupement d’amateurs et la profusion de commentaires derriere moi). Ils me demandent combien ce sera, je leur explique (encore l’allemand) que je fais ca pour mon plaisir. Mais en bon mecene, l’un deux me paye l’hotel et le petit dejeuner, sans compter.. les thes !

L'hotel du mecene


2 commentaires:

Anonyme a dit…

Moi qui croyais que le chat-bite était une exception culturelle francaise ...
Encore une fois, on fait rien qu'a copier l'Orient.

Sinon, j'ai pondu une vraie fausse page roulée sous les aisselles avec ma poignée de photos (l'ancienne n'était qu'une fausse vraie page impratiquable):

http://supernovae.in2p3.fr/~baumont/Pics

J'te bise, gare aux Antonov ronds comme des barriques.

Sylvouille

Anonyme a dit…

t'es ouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu?????????????
la mama